Petites histoires de la cuisson du pain

Au début -en 1969- de mon installation comme patron boulanger-pâtissier, j’étais étonné de l’expression employée par les plus âgés de la clientèle pour apprécier la qualité de leur boulanger. 

Ils le formulaient en disant ; « Il cuit bien », comme si la cuisson résumait la qualité globale qui tient également du pétrissage et de la fermentation.
J’ai mieux mesuré par après, la teneur de ce propos.
Il est vrai que le boulanger d’autrefois, ne faisait que cuire les pâtes, c’était sa seule compétence.
On lui apportait la pâte et il était payé pour la cuisson.
Dans un vieux dictionnaire wallon-françois de 1793 le « cûxheje » -la cuisson- était l’expression employée pour « l’action de la chaleur qui sert à cuire ou pour le prix qu’on paye au boulanger pour cuire le pain ».
Comme le boucher n’était payé que pour le « touweje » -l’action d’abattre la bête- qui était selon l’usage, « le salaire qu’on donne à un boucher pour tuer la bête » .

Cet usage est aussi une explication de ce vieux tableau du boulanger corniste, sonnant pour annoncer à ses clients que son four est prêt pour enfourner les pâtes ou pour signaler que la cuisson est finie et qu’ils peuvent venir reprendre le fruit de la cuisson.

On le voit également sur une peinture à l’huile de 1681, plus connue, « De hetebroodblazer », soit le boulanger qui appelle pour signaler que le pain est cuit, du hollandais Job Adriaensz Berckheyde .

Pour apprécier si la chauffe du four à bois en chauffe directe est suffisante, de multiples pains sont renseignés par Hubert Chiron comme testeurs de l’état de la chauffe.
Par exemple, la falue, -ou les forts semblables, fouée, faluche. La flambade ou flambadelle, flambeche et les gâches sont enfournées après la flambée du bois, « avant coup » dit même Lionel Poilâne .

Ils sont saisis plutôt que cuit, précise ce dernier auteur présentant les pains régionaux français.
Le souflâme en Charente est même enfourné au contact des braises.
Pour évaluer si la chauffe est à point, on fera passer du papier journal dans le four qui doit brunir en peu de temps et non brûlé.
Comme la farine jetée sur la sole qui doit brunir dans les 10 secondes . «…si elle roussit sur le champ, la chaleur du four est au point convenable : que si la farine noircit, le four est trop chaud ; enfin si elle conserve sa blancheur, le four n’est point assez chaud ».

On rappellera souvent que la voûte doit être blanche.
Le blanchiment des briques est provoqué non pas par l’élévation de la température nous rappelle Seni sur un fil de discussion de ce forum, la flamme provoque la pyrolyse des fumées qui se sont précédemment déposées sur les briques, à ce moment la température de surface atteint donc les 700 à 800° pour quelques secondes.
Dès l’arrêt de la flamme, cette température se stabilise entre 300 et 350° en fonction du temps de chauffe.

Une brique chauffée avec un chalumeau, blanchi en quelques secondes, mais refroidi à la même vitesse.
Alors si le blanchiment de la voute permet d’évaluer la température d’un four à un moment précis, le fournier qu’est Serge maintient que cette température dépend de nombreux paramètres : qualité des briques, forme de la voûte, qualité et volume de la masse isolante, qualité du bois, vitesse de la chauffe, météo, etc.

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