Les Grèves de Fougères

Fougères, comme une grande partie de la Bretagne, a longtemps été marquée par l’industrie textile. Au XIXe siècle, cette activité est en déclin et la ville se tourne vers la confection de chaussons tressés. Au Second Empire, celle-ci est remplacée par la fabrication de chaussure. Elle devient rapidement une activité essentielle de la ville, avec une classe ouvrière d’environ 12000 ouvriers au début du XXe siècle, en comptant les activités annexes qui y sont liées. Cependant les usines restent de tailles variable allant de la simple entreprise familiale à la manufacture mécanisée.

Chargement de pain destiné à la Bourse du Travail

À l’automne 1906, le patronat entame des négociations usine par usine afin de revoir les tarifs auxquels les ouvriers sont rémunérés. Mais ces négociations échouent et une grève partielle est organisée par les ouvriers. La réponse patronale se traduit par un lock-out, la fermeture des entreprises, qui laisse 6000 ouvriers sans travail donc sans revenus, afin de les obliger  à accepter leurs conditions. Le 13 novembre 1906, la grève générale est votée déclenchant ainsi un conflit qui allait durer trois mois.

Dans ces grèves du debut du 19 eme siecle, le pain a une place prépondérante, comme en temps de guerre. À travers plusieurs cartes postales nous découvrons ce rôle important que le pain tient à cette époque dans le monde ouvrier. Sa consommation dépassant les 750 grammes par jour.

Nous allons également découvrir le portrait d’un menuisier qui joua un role très important  dans cette grève.

Le syndicat « rouge » de la Bourse du Travail de Fougeres, qui compte environ 1200 membres, coordonne le mouvement et la solidarité s’installe entre les travailleurs. Des soupes communistes sont organisées . Ce sont plusieurs centaines de repas qui sont distribués par jours aux ouvriers grévistes sans revenus et à leurs familles.

Le 9 décembre des enfants sont accueillis dans des familles rennaises, d’autres  partent tout au long de la durée de la grève à Saint-Nazaire, Laval, à Flers et même à Paris . Jean Jaurès vient à Fougères pour soutenir le mouvement.

Distribution du pain de la Municipalité, sous la présidence du Maire Destries

En attendant le trempage de la soupe

Les patrons des principales usines se regroupent dans un syndicat pour poursuivre les négociations, mais le syndicat « rouge » n’est pas reconnu et est écarté des discussions. Le syndicat patronal préfère traiter avec le syndicat peu combatif des « jaunes » de la bourse indépendante, d’environ 200 membres. Ce dernier avait déjà signé les premiers accords sur les tarifs des ouvriers avant le début du conflit. Avec sa participation, les patrons tentent par tous les moyens de casser la grève générale.

Soupe communiste, épluchage des légumes et découpage du pain.

En attendant la distribution de la soupe

Le 9 janvier 1907, soutenus également pas les gendarmes, ils décident de rouvrir les usines pour que les ouvriers les plus modérés puissent reprendre le travail. Des manifestations se tiennent sans incidents devant les usines et les grévistes obligent le syndicat patronal à refermer leurs usines.

Ce même jour est publiée dans le journal l’Humanité une liste de généreux donateurs venant en aide aux grévistes et leurs familles, nous y trouvons ceci :

Pour les grévistes de Fougères « Trentième liste »

« Collecte faite par un groupe de compagnons gavots a leur réunion mensuelle, 3 francs »

Un mois plus-tard, la veille de la reprise du travail, un gréviste est assassiné par un « jaune » pour pousser les ouvriers à commettre des actes de violences.

Distribution du pain à  la Bourse du Travail

Les députés socialistes Wilm et Ghesquieres, M. Poisson, rédacteur a l’Humanité et Mme Poisson, goutent la soupe communiste à  la bourse du travail.

Soupes gratuites à  l’Oeuvre Saint-Joseph

Rennes, Place de la Mairie. Exode des enfants de Fougères. La Bourse du Travail de Rennes, dans un but de solidarité, prend l’initiative de faire adopter pendant la durée de la grève par les Camarades Rennais les enfants nécessiteux des grévistes Rennais. Le 9 décembre un premier convoi de 160 enfants arrive à Rennes au milieu d’une foule enthousiaste ; ces enfants sont repartis de la Bourse du Travail dans différentes familles.

Une commission parlementaire arrive à Fougères au mois de janvier pour débloquer la situation. Les négociations reprennent entre le syndicat patronal et les délégués du syndicat rouge enfin reconnus. Le travail reprend le 11 février après 103 jours de conflits et de longues négociations usine par usine. Cette grève n’apporte qu’une infime augmentation de salaire pour les ouvriers mais c’est une victoire plus profonde. Elle permet la reconnaissance du syndicat rouge à Fougères et plus largement celle d’un syndicalisme combatif en Bretagne.

Charles Bougot, promoteur de l’exode des enfants des grèvistes de Fougères

Charles, Marie Bougot est un militant ouvrier et homme politique né le 23 janvier 1872 (Guichen), Fils d’un petit entrepreneur, après avoir suivi ses études à Guichen, il entre à l’Ecole Pratique d’Industrie de Rennes, puis commence à travailler dans diverses villes de France, non sans mettre sa carrière en sommeil pour effectuer son service militaire dans le Génie à Versailles.

Il travaille un moment à l’Arsenal de Rennes où déjà, il apparaît comme un ardent militant du mouvement ouvrier.  En 1893, au cours d’un séjour à Paris, il fait campagne pour Aristide Briand qui se présente aux législatives et qui vient de fonder avec Jean Jaurès le Parti Socialiste. En 1898, Charles Bougot est l’un des fondateurs, à Rennes, de la première coopérative de consommation (alimentation).

En 1899, il participe à la création de la section rennaise de la Ligue des Droits de l’Homme, dont il devient le Vice-Président (1905). En 1900, il participe en tant que chef de chantier aux travaux de l’Exposition Universelle à Paris.

De 1904 à 1924, il est président ouvrier du Conseil des Prud’hommes.

En 1906, Charles Bougot est trésorier de la Bourse du travail lors du ‘’Lock-out’’ de Fougères où les patrons refusent de donner du travail aux ouvriers pour briser toutes revendications, et qui réduit au chômage 6 000 ouvriers de la chaussure. Il organise alors l’exode des enfants des familles touchées dans des familles ouvrières rennaises.

La guerre 1914-1918 interrompt sa carrière et ses activités. Début 1915, il est mobilisé comme Sergent. Malgré son âge, il est envoyé en première ligne parce qu’inscrit au carnet B comme ‘’révolutionnaire dangereux’’. Fin 1915, il est grièvement blessé dans l’Argonne . Il reçoit la Croix de Guerre ; à la Libération, il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur.

En 1919, de retour à Rennes, il reprend sa place au conseil municipal et est membre influent du parti socialiste du départementEn 1940, Charles Bougot est exclu du conseil municipal et Office Municipal des Habitations Bons Marches, par le régime de Vichy, il n’aura plus aucune activité publique.

Charles Bougot décède le 10 Juin 1949, à l’Hôtel-Dieu de Rennes.

(Sources : wiki-Rennes ;  Syndicat des travailleurs de Bretagne)

Fougères, après la grève- la rentrée des petits Fougerais. On attend le tramway qui amène les enfants de Rennes. À gauche du drapeau, le citoyen Jaures ; à droite, le citoyen Benezech.

Laurent Bourcier, Picard laFidélité, C.P.R.F.A.D.

Commentaires concernant : "Les Grèves de Fougères" (2)

  1. Picard la fideltie a écrit:

    Mr Bougot bonjour,
    Nous sommes desoles, mais nous n’avons pas d’autres informations sur Charles Bougot, les seules que nous ayons sont publiees dans cet article. Cordialement
    Picard la fidelite

  2. bougot a écrit:

    Bonjour,

    Dans le cadre de recherche généalogique, pourrais-je s’il vous plais avoir de la documentation sur la vie de Monsieur Charles Bougot.
    D’avance merci.

    Bougot Frédéric.

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