Emile Massicot

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Emile  MASSICOT est né en 1866 à Gensac la Pallue (16), reçu à Troyes à la Toussaint 1886, sous le nom d’Angoumois Coeur Sincère.

 Angoumois Coeur Sincère est cité dans un rapport hors du commun!

En effet, comment imaginer de nos jours que les responsables de la société compagnonnique provoquent une réunion afin de statuer sur le sort de deux Compagnons boulangers qui ont changé de profession pour exercer celle de patron de maison de tolérance! (d’une maison close, ou des dames de petite vertu vendent leurs charmes).

Eh bien! C’est pourtant le cas en ce mois de juin 1892.

Un évènement particulier avait mis le feux aux poudres quelques mois plus tôt, à la Noel 1891, lorsque les compagnons de Rochefort avaient organisé une réception pour quatre aspirants.

Le premier en ville d’alors, Marcelin TARDIEUX, Angoumois le Soutien des Frères, avait fait appel à Jean BREUIL, Marmande l’Ornement du Devoir et à notre Emile MASSICOT, Angoumois Coeur Sincère, tous deux tenanciers d’une maison de prostitution, ainsi qu’a Mathieu ARTIGUEBERT, Marmande la Fermeté, pour l’assister lors de cette réception.

Or, Marmande la Fermeté avait un passé bien trouble, il avait été exclu à vie pour vol chez son patron, à Agen, puis, il avait été réintègre par les Compagnons de la Cayenne de Tours, malgré sa moralité douteuse.

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Une maison close au début du 20ième siècle. Dessin de Raoul Alba.

Et pourtant, c’est lui qui pris la direction de toute la réception!

Ajoutons pour compléter ce panier de crabes, que l’argent s’était évaporé de la caisse durant le temps où le Premier en ville, Angoumois le Soutien des Frères assumait la direction de la Cayenne de Rochefort.

La mesure était comble, c’est un compagnon actif de Rochefort qui prit l’initiative de dénoncer la situation en écrivant à Paris, Cayenne administrative du tour de France des Compagnons Boulangers du Devoir.

Léon FRECHET, Poitevin le Fidèle Courageux était en effet de ceux qui ne badinait pas avec le règlement.

Dans un premier courrier adressé à la chambre administrative, il s’indigne de la situation peu honorable de la Cayenne de Rochefort et se fait porte parole d’un certain nombre des Compagnons qui participaient à la réception.

Il relève que la présence des deux souteneurs n’était absolument pas nécessaire puisque, pour faire cette réception, les compagnons étaient déjà en nombre parfait sans avoir besoin d’aller en chercher d’autres.

De plus, les deux compagnons en cause avait été déjà exclus temporairement en application des articles 160 et 161 du règlement intérieur, qui nous apprend que:

« Tout compagnon qui ferait des travaux hors sa profession et qui pourrait […] le nom de compagnon, les compagnons en place seront en droit de le faire partir de la ville, en plus une amende de trois francs. »

Et l’article 161 nous précise : «S’il persiste à ne vouloir partir de la ville, il sera mis hors de chambre.»

Ne devait-ils pas quitter la ville les Pays Breuil et Massicot ?

D’autant plus qu’ils étaient tout particulièrement visés par un dernier article dont voici la teneur:

«Tout compagnon reconnu avoir été dans des maisons de tolérance, prostitution, avec  canne et couleurs et insignes aux oreilles, sera exclu pour un an hors de chambre et payera dix francs d’amende, ceux qui n’auront que les insignes seront à l’amende de trois francs ».

A la lecture des informations communiqués par Léon FRECHET, Poitevin Fidèle Courageux , la chambre administrative ordonne à la Cayenne de Rochefort d’organiser une assemblée afin de prendre les décisions qui s’imposent. Mais les résultats vont aller complètement à l’encontre de ce que  Poitevin Fidèle Courageux espérait.

En effet, Marcelin TARDIEUX, Angoumois le Soutien des Frères, Premier en ville, ne désarme pas.

Il prend la défense de ses Pays BREUIL et MASSICOT et ces derniers en profitent pour demander leur réintégration officielle !

Et c’est la que Marcelin TARDIEUX, Angoumois le Soutien des Frères, en tant que Premier en ville, use d’un vicieux subterfuge pour aboutir à ses fins.

A l’issue de l’assemblée, il fait voter aux compagnons le changement de bureau et les invite à signer le bas d’une feuille (le procès verbal de la réunion) où sera rédigé ultérieurement, selon lui, le compte rendu de l’assemblée !

Inconscience des présents, lassitude ou excès de confiance ?

En tout cas les treize présents signent une feuille blanche sur laquelle le Premier en ville mentionne ensuite, non pas la composition du nouveau bureau, mais seulement la réintégration des pays BREUIL et MASSICOT, les tenanciers des maisons de tolérance !

Une fois l’affaire connue, la Cayenne se trouve en pleine désunion.

Et comme les coupables sont souvent ceux qui révèlent les fautes sans les avoir commises, une majorité des compagnons se venge en excluant pour deux ans Léon FRECHET, Poitevin Fidèle Courageux, l’auteur de la dénonciation.

Le Pays BANC, Poitevin la Justice, Second en ville, qui soutient Poitevin Fidèle Courageux , est lui aussi exclu pour avoir taché d’encre les signatures du faux procès-verbal et parait-il dérobe de l’argent de la société.

L’affaire remonte évidemment jusqu’a Paris. La chambre administrative, pleine de sage discernement, se rend vite compte qu’il ne s’agit que d’un vulgaire coup monté.

Elle informe donc le tour de France qu’elle usera de tous les moyens à sa disposition pour rendre caduque la décision de la Cayenne de Rochefort, et qu’elle le fera savoir, entre autres, par la voie des deux journaux compagnonniques d’alors: « Le Ralliement »et l’ « Union compagnonnique». Elle en avisera aussi la Loge Maçonnique « Le parfait accord », dont Léon FRECHET fait partie.

De plus, nous retrouvons en juillet 1893, nos Compagnons FRECHET, Poitevin le Fidèle Courageux, Premier en ville de la Cayenne de Rochefort ; et BANC, Poitevin la Justice « mère » au 6 rue Duvivier (avec parution du changement de mère, dans le journal « Le Ralliement » de juillet 1893)

Emile  MASSICOT, Angoumois Coeur Sincère décède à Paris, les Honneurs Compagnonniques lui sont rendu  le 10 avril 1925.

Léon FRECHET, Poitevin le Fidèle Courageux, né en 1844 à Mothe Saint Heray (79), reçu à Paris à la Saint Honoré 1864. Décède le 10 aout 1910 à Rochefort.

Marcelin TARDIEUX, Angoumois le Soutien des Frères, né en 1864 à Bioussac (16), reçu à La Rochelle à l’Assomption 1883.

Jean BREUIL Marmande l’Ornement du Devoir ,né en 1852 à Virazeil (47), reçu à Pâques 1875 à Bordeaux en 1886.

Alfred BLANC, Poitevin la Justice, né en 1854 à la Mothe Saint Heray (79), reçu à Rochefort à l’Assomption 1876.

Mathieu ARTIGUEBERT, Marmande la Fermeté, né en 1856 à Marmande (47), reçu à Bordeaux à la Toussaint 1875.

Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.

Commentaires concernant : "Emile Massicot" (5)

  1. Laurent BASTARD a écrit:

    Voici quelques petits compléments biographiques sur les acteurs de cette sulfureuse affaire, puisés dans la consultation des actes d’état civil en ligne, pour les départements des Deux-Sèvres et de Lot-et-Garonne. Notre ami Laurent Bourcier complétera ainsi son fichier
    généalogique des CBDD.

    – FRECHET : il était prénommé Jean Léon (Léon étant son prénom usuel). Il était né le 3 août 1844.
    – BREUIL Jean : il était né le 28 septembre 1851 (et non 1852).
    – BANC : ses deux prénoms étaient Louis Alfred (Alfred étant le prénom usuel). Il était fils de Michel BANC, boulanger et était né le 29 mai 1854.
    – ARTIGUEBERT : l’orthographe du nom est ARTIGUEBERE. Mathieu Artiguebère était né le 15 janvier 1856. Il était le fils d’un meunier.

    Merci à Picard la Fidélité pour ces tranches de vies compagnonniques pittoresques !
    Laurent Bastard

    • Laurent Bourcier a écrit:

      Merci pour ces precieuses informations 🙂
      Laurent Boucier, Picard la fidelite

      • Laurent Bourcier a écrit:

        Nous allons bien sur apporter les rectifications dans notre article.
        Merci
        Picard la fidelite

      • Laurent Bourcier a écrit:

        Chers lecteurs
        Je tiens a remercier particulierement M Jean Louis Calbe qui, une fois de plus (nous lui devons les photographies de la sepulture de Journolleau, Rochelais l’enfant cheri qui ont ete publiees sur ce site) a oeuvre pour la memoire de notre Devoir.
        Celui-ci a, en effet, effectue des recherches sur Tardieu et Massicot. Voila le resultat de ses travaux:
        Marcelin Tardieu ne le 29 novembre 1864 a Roissac (16), decede a Cognac le 1 avril 1947; fils de Martial Tardieu et Melanie Cosson, cultivateurs.
        Emile Massicot, ne le 24 juillet 1867 a Gensac la Pallue.
        Nous allons bien sur apporter les rectifications dans notre article !
        Merci a M Calbe!
        Picard la fidelite

  2. Boucherès Alain a écrit:

    Mon cher Picard la Fidélité,

    Je suis encore stupéfait par l’originalité de l’article présenté!
    Des Compagnons Boulangers « Maquereaux » tenant une auberge!!! Rien que çà!
    Je pensais avoir tout vu et tout entendu dans ma vie compagnonnique! Mais non!!! Que nous réserves-tu encore???
    Celle-là n’est pas piqué des vers! Qui plus est, l’on retrouve 2 Compagnons Boulangers Marmandais qui exercent cette lâche et perfide besogne!
    Moi qui suis si fier de mes origines! Voilà que cette histoire des Chiens-Blancs vient ternir ma fierté Lot & Garonnaise!
    Cependant, cette histoire démontre bien que nos Anciens n’étaient pas que des « SAINTS », car inclure dans le règlement général  » tout compagnon reconnu avoir été dans une maison de tolérance…. »prouve bien qu’il devait y avoir de sacré abus de déchéance et de décadence!!! Cependant, remettons tout cela dans le contexte de l’époque, et ne jugeons pas avec notre façon de penser contemporaine.
    De plus, je me garderai bien de « jouer » les innocents…
    Autre chose, l’histoire du document signé, et dans lequel il est rajouté un compte- rendu falsifié : odieuse et lâche pratique! J’en conviens!!! Cela me rappelle les biens tristes souvenirs !
    En tous cas, mon cher Picard la Fidélité tu nous as livré un post vraiment anticonformiste! Merci encore!
    Agenais la Tolérance
    CB

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