1914-1918, les boulangeries sous les bombes…


Ce petit article ne vient pas donner un cours d’histoire de France, le but du Centre de Recherche et d’Etude de la boulangerie et de ses Compagnonnages n’étant pas là. Cet article va être exceptionnellement, composé uniquement de photographies et d’un témoignage écrit et nous n’apporterons aucun commentaire. Les images se suffisent largement à elles mêmes.

Boulangerie Pâtisserie L. QUENTIN, rue de Cernay, Reims (Marne).

Raon l’Etape, Place du Marché aux Vins (Vosges).

Rue Jeanne d’Arc, Compiègne (Oise).

Pâtisserie-confiserie-pain d’épices E.SIGAULT. Reims (Marne).

“Ce qui reste de la boulangerie DECARSIN ! » Péronne (Somme).

Corbie, Rue de la Boulangerie (Somme).

Corbie, Boulangerie de Monsieur LANGLET , bâtiment de droite ayant subit les bombardements.
(Archives A.Langlet)

Ernest Langlet (1861- 1939) est boulanger à Corbie, après avoir quitter la région pour cause des combats intensifs, il décide début septembre 1918, de retourner voir dans quel état se trouve sa ville et son commerce. C’est part un courrier, daté du 7 septembre, qu’il informera son épouse Marie de ses premiers pas, de ses premiers regards, de ses premières pensées… :

« Ma Chère Marie,

Je suis arrivé ce jour à une heure de l’après midi, transporté par un camion automobile, d’Amiens à Pont Querrieux et Laneuville*. J’ai descendu en face de la maison Mellier, pour rejoindre à pied notre chère demeure. Depuis la Neuville jusque dans Corbie pas une maison n’est épargnée, plus ou moins. Certaines sont effondrées, l’orphelinat, il ne reste que les murs, l’église sur le côté l »école des filles est très amochée, découverte et effondrée sur le côté de la petite porte d’entrée. J’ai pénétré à l’intérieur, c’est désolant. J’arrive sur la place, la maison Lesieur jusque chez Mm Boulanger et l’hôtel de la poste, des murs de chez Gond jusqu’a la ruche des murs. Egalement le paté de maisons de chez Dubaite à Pregalders aussi que le derrière des murs seulement, la maison Galhaut très abimée. J’ai visité chez lui, c’est un désastre, on prend ce qu’il reste, quelques soldats fouillaient encore.

Chez nous, c’est bien triste également, presque toutes les toitures sont a refaire, sur la façade, il y a au moins trois gros obus qui ont percés d’un mètre de circonférence le mur entre les deux grandes portes, un gros a brisé la fenêtre de ma chambre et brisé mon lit et les deux petits placards, le service a café est cassé par-dessus les décombres, avec un vaste trou dans le plancher sous mon lit, la cloison n’existe plus, cela a rendu ma chambre plus grande.

A la boutique, quelques carreaux de carrelage cassés et au dessus du gaz un grand trou.

Il ne reste plus de chaussures, ni de chapeaux. Dans la cuisine, quelques plats, dans l’armoire sur la rue, le réchaud à gaz y est encore . Il y a quelques petits verres dans la buanderie  avec tous les coquetiers et quelques plats. Dans le fournil tout y est encore, même les courroies.

Dans la chambre de Palyte, plus rien, à coté également.

Dans le grenier au dessus des chambres, des pots à confitures et quelques livres, les combles. Enfin dans la buanderie, les baquets y sont encore, mais en désordre et le linge par terre, il est tombé aussi des obus dans ce coin. Ainsi que sur l’autel, coté Mr Vaneux les toitures sont  bien endommagées. J’ai retrouvé le charbon à coté de chez Vignon, du bois, il en reste pas mal, mais le tombereau a été changé, c’est un vieux que j’ai trouvé a la place.

Je vais tacher d’aller à Daours et faire enlever ce qu’il reste, car j’en ai surpris qui volaient mes sacs vides. Chez Galhaut, on fouillait quand je suis arrivé. Il faudrait que Camille puisse venir, mais voila, rien à boire et rien à manger. Nous sommes 4 ou 5 civils, Mme Boulanger qui parle déjà de repartir, n’ayant rien à manger. Moi même je vais aller à Daours demain et essayer de faire déménager le peu qui reste. Ce qu’il faut ce serait de faire couvrir. Je vais sans doute voir venir le Maire et on s’arrangera.

Je couche à la maison ce soir sur un sac, avec 80 soldats qui viennent d’arriver du front.

Corbie est dévasté, il faudra des années pour l’habité, j’ai été jusqu’au pont de Mm Lardiere, tout est brulé chez elle, et chez Mr Bulot la […]brulé ; Dubois brulé.

Je t’embrasse bien fort ainsi que René, Jean doit venir me […] pour trois jours, il demandera trois jours de permission pour Corbie.. »

*Laneuville les Brays

J’ai tenu a rapporter ici ce témoignage exceptionnel, qui nous fait découvrir « une épreuve morale »  supportée avec courage, et pour preuve, aujourd’hui, depuis quatre génération, la famille Langlet est toujours présente à Corbie, et fait partie des meilleures Boulangeries Pâtisseries de la Somme. Je tiens à remercier tout particulièrement Alain LANGLET, pour premièrement avoir mis à ma disposition ses archives familiales, et deuxièmement, de me permettre de les publier sur le site du CREBESC.

Monsieur LANGLET, au nom de la Mémoire des Hommes de la Boulangerie, par trois fois merci !

1944, les soldat allemands prisonniers encadrés par les F.F.I., lors de la libération de Corbie, passants devant la Boulangerie Pâtisserie LANGLET…
(Archives A.Langlet)

 Laurent Bourcier, Picard la fidélité C.P.R.F.A.D.

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